Le douglas

Pseudotsuga menziesii

Quiétude, fluidité, apaisement…

Le retour du douglas

Le douglas a existé en Europe avant les glaciations de l’ère quaternaire. Puis il a disparu. Ce n’est seulement que depuis deux siècles qu’il est revenu, importé d’Amérique du Nord et fortement prisé pour toutes ses qualités :

  • il pousse très vite (1 cm de diamètre par an) et très droit,
  • il s’acclimate à de nombreuses conditions de sol et de climat,
  • son bois est une bénédiction: droit, solide, beau (une belle couleur saumonée) et au coeur imputrescible (le douglas est de classe 3 et peut être utilisé en extérieur pour des bardages, des poteaux, des terrasses).

 

Une bénéfiction qui tourne au désastre

Ces qualités font le bonheur des sylviculteurs intensifs, des actionnaires des grands groupes de l’énergie et de toute la filière forestière industrielle. Et malheureusement, ces acteurs ont tiré la corde bien trop loin. Désormais, des massifs entiers comme le Morvan, le Beaujolais ou le plateau de Millevache sont en train de devenir d’immenses champs d’arbres, qui remplacent, après de terribles coupes rases, des forêts de feuillus natifs et centenaires. C’est ce phénomène qu’on appelle l’enrésinement. Dans un champ d’arbres en monoculture, il n’y a plus de forêt. L’écosystème est totalement détruit, le sol est nu, plus rien n’y pousse à cause de l’obscurité et de l’acidité des aiguilles de résineux (les épicéa, et donc, de plus en plus souvent le douglas). Les animaux partent ailleurs ou bien meurent.

Ce qui est plus terrible encore, c’est que les diamètres qui plaisent au marché du bois d’oeuvre sont de 35 à 40 cm, c’est à dire ceux des douglas pré-adolescents, d’environ 35 à 40 ans. Ils sont tués avant d’avoir pu atteindre la maturité.  C’est important car c’est seulement à partir d’un certain age, en l’occurrence bien plus tardif que celui auquel on les coupe, que les douglas commencent à rendre au sol les nutriments qu’ils lui ont emprunté pour leurs premières décennies de croissance. Alors, si on coupe les douglas à 40 ans, et qu’on en replante et qu’on les recoupe à 40 ans et ainsi de suite, c’est une exportation nette et permanente de matières organiques de premier choix qui s’opère, sous la forme de bois. En 2, maxi 3 cycles, les sols deviennent des déserts. 

Les douglas ont deux autres faiblesses: ils sont plus sensibles que d’autres arbres au bouleversement climatique, et ont un système racinaire relativement faible, et surfacique. Très mauvaise combinaison, en ces temps où les maladies des arbres augmentent avec le réchauffement, et où les tempêtes se font de plus en plus fréquentes, violentes et chaotiques. Ne reste plus qu’à combiner ces risques avec le fait que ces douglas sont cultivés au cordeau dans les champs d’arbres… si quelqu’un n’a encore jamais compris ce qu’était l’effet domino, qu’il se poste dans un de ces champs et attende le prochain coup de tabac. Port du casque obligatoire…

 

La seule solution : la modération et une relation plus sensorielle

Alors oui, c’est vrai que cet arbre est plein de qualités à de nombreux égards, mais ces qualités sont effectives seulement si cet arbre pousse dans une forêt et non pas dans un champ d’arbres. Cela signifie avec d’autres espèces, qui résistent mieux au vent, et protègeront ce géant (record en Alsace avec 62 m, et aux USA avec 100 m, pour 1200 ans), dans un environnement qui ne connaîtra pas de coupes rases, dans le respect de tous les êtres vivants qui vivent dans cette forêt.

Là, le promeneur ou le baigneur de forêt (pratiquant le shinrin-yoku) pourra profiter des vertus sylvothérapeutiques du douglas. A commencer par son essence, qui parfume les forêts à perte d’odorat. Prenez des aiguilles de douglas, et frottez-les. Si une odeur d’agrume mélangée à de la citronnelle vous explose aux narines, c’est que c’est bien un douglas. C’est le meilleur moyen d’identifier cet individu ! La quantité de terpènes dans l’air (et parmi eux de phytoncides), est telle que passer une heure au milieu des douglas peut sensiblement améliorer à la fois l’humeur mais aussi le système immunitaire et le niveau de quiétude. D’ailleurs l’aéroport d’Heathrow, à Londres, ne s’y est pas trompé puisque de l’huile essentielle de rameaux de douglas a été diffusée dans les salles d’attente pour détendre les passagers avant leurs vols.

De plus, regarder un de ces géants qui file tout droit vers le ciel sans se poser de questions (sans même assurer trop son enracinement), c’est entrer en contact avec cette formidable vitalité, et cette fluidité, comme pour le sapin, qui fait que la sève va circuler dans ces immense troncs et réussir à atteindre la cîme. Ceux qui ont vu des grimpeurs de haut niveau escalader des falaises comprendront cette notion de fluidité avec leurs tripes: ces grimpeurs donnent l’impression que c’est “tout facile”, quand bien même ils se tiennent sur des bi-doigts en surplomb. Leur aisance de lésard / chat / araignée se retrouve dans ces arbres incroyables qui font monter leur sève si haut.

Il est tout de même recommandé de compléter une séance rapprochée avec un douglas par un moment avec un chêne ou un frêne, des arbres aux racines profondes, pour retrouver l’ancrage.

Sources

L’énergie des arbres – Plantes et Santé, hors série 2017

L’expérience de l’auteur

Le GFSFM (Groupement Forestier pour la Sauvegarde des Feuillus du Morvan)

Le douglas
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