Comment danser avec la forêt en plein hiver ?

Froid, humidité, tranquillité de la faune, chasseurs, gadoue, nuit… Tant de raisons de ne pas aller danser dans la forêt en plein hiver malgré toute la magie que cela représente. Alors nous avons imaginé un dialogue entre la forêt, une future participante (féminin lié aux statistiques des participant.e.s en général) et Entre les Arbres / La Tribu Dansante, que nous nommerons Organisateur.

La forêt : Vous-voulez faire quoi exactement ?

Organisateur : Proposer une session de danse en pleine forêt avec un groupe, pour le solstice d’hiver. On fera du feu et on utilisera les casques, est-ce que tu serais d’accord, sachant qu’habituellement, tu préfères le son des enceintes aux ondes des casques, mais là, en hiver, je me dis que c’est peut-être différent, non ?

La forêt : Oui, c’est différent. Le son est innapproprié en hiver. Il dérange mes habitants animaux. Même si les ondes, ça ne reste pas top. Elles dérangent beaucoup les oiseaux.

Organisateur : Oui, et c’est tout de même OK ?

La forêt : oui, si c’est ponctuel, mais pas plus de 3h d’émission, d’accord ?

Organisateur : d’accord, oui, merci. Et pour le sol ?

La forêt : Vous allez encore danser à fond autour du feu, au même emplacement que d’habitude ?

Organisateur : oui.

La forêt : Si c’est pas un nouvel emplacement, alors ça va. Ne tassez pas trop autour, et arrosez d’un peu d’eau, en offrande symbolique, comme d’hab, à la fin.

Organisateur : tu n’en as pas marre, de l’eau, en ce moment ?

La forêt : Tu m’as bien regardée ?

Organisateur : OK, OK.

Future participante : Moi, je me tâte pour m’inscrire. J’ai super envie de tenter l’expérience, mais je me dis qu’il va faire froid et humide. C’est quand même risqué, non ?

Organisateur : Ah oui, j’entends que s’il fait froid et humide, tu aurais peur de tomber malade, c’est ça ? Ou que ce soit tellement inconfortable que tu n’en profites pas ?

Future participante : Oui, exactement. En ce moment, mon délire, c’est plutôt rester au chaud et au sec, sous la couette près de la cheminée, tu vois ?

Organisateur : Comme je te comprends. Après, si tu veux, je te raconte comment ça s’est passé les trois fois précédentes ?

Future participante : Oui, ça m’aiderait à me représenter un peu plus votre proposition.

Organisateur : déjà, c’est durant ces moments-là, les sessions de danses-forêt durant les sostices d’hiver, que nous avons vécu, personnellement, les moments les plus magiques (et au dire des participant.e.s régulier.e.s aussi). Danser autour d’un feu de un mètre cube en pleine nuit à quinze personnes sur un sol givré pieds nus ou en se roulant dans la terre dans des moments de danse contact improvisés, ça avait un tel souffle de folie que nous étions tous marqué.e.s à vie. Ce sont clairement des moments hors norme, très loin du carcant habituel de notre société. De nombreux verrous sautent, nous nous autorisons des facettes de nous qui restent au placard dans les autres espaces.

Future participante : ça fait rêver… Mais, tu ne m’as pas encore parlé du froid, de l’humidité, de la gadoue, et tout et tout…

Organisateur : Si mais en positif : ça fait partie de ce qui rend cette expérience hors norme. Mais je suis d’accord, il y a aussi l’inconfort, voire l’insécurité, alors parlons-en. Pour le confort, ça peut s’anticiper : prends des habits chauds, que tu auras sur toi, et une tenue de rechange, chaude aussi, pour quand tu auras bien transpiré. La laine, idéalement de mérinos, c’est la panacée. Avec ça, tu n’as jamais froid, même quand il fait très humide. Mets plusieurs couches si vraiment tu crains. Et tu verras, très vite, en dansant, et avec le feu, tu vas te réchauffer, et tu vas enlever les couches les unes après les autres. Beaucoup finissent d’ailleurs en sous-vêtements (parce que pour l’instant nous n’allons pas jusqu’à la nudité, ça viendra peut-être un jour…), et donc, prévois des sous-vêtements “montrables”, si tu ressens le besoin de sentir la chaleur du feu directement sur ta peau. Et ça, c’est une sensations incroyable.

Future participante : dis-donc. Je ne suis pas sûre que j’irai jusque-là.

Organisateur : tou.te.s les participant.e.s disent ça au début. Et au final, tu en as au moins la moitié qui finissent torse nu ou en brassard. Et pas mal en culotte. Mais chacun.e fait absolument comme il / elle veut, il n’y a rien de forcé, chacun.e son rythme. J’ajoute que la luminosité et l’expérience personnelle de chacun.e permet d’être relativement tranquille avec les regards extérieurs.

La Forêt : moi, j’aime vous voir danser comme vous êtes, dans votre authenticité. Ne forcez rien, je vous en prie. Ce qui compte pour moi, c’est le chemin de reconnexion que vous faites, peu importe si c’est avec trois doudounes ou à poil. 

Future participante : OK. Et pour la sécurité, genre comment être sûre de ne pas attraper la mort dans votre truc ?

Organisteur : Il y a deux clés. Le feu, of course. Si tu restes à côté, tu cuis. Et sinon, c’est le mouvement. D’ailleurs, même pour les solstices d’été, sous 35°C, nous le disons aussi dans notre guidance : la danse, c’est le mouvement, comme la vie. Ca peut être juste de respirer en conscience, bouger un orteil, du moment que tu bouges, tu danses, tu vis. En plein hiver, nous insisterons peut-être plus sur des mouvements qui permettent de bien échauffer et réchauffer ton corps. Après, prends bien un thermos, un repose-fesses isolant pour quand tu seras au sol, et je le redis, prévois un change complet pour après les sessions de danse.

La forêt : et puis n’oublie pas qu’en mon sein, avec le froid, la bactérie Mycobacterium vaccae, la qualité de l’air, la vue de mes formes fractales, et de nombreux autres bienfaits, vous allez booster votre système imunitaire, justement !

Future participante : OK. Bon, mais je vais me salir, ça c’est sûr, non ?

La forêt et organisateur, pliés de rire : Ah oui, ça c’est sûr ! Prévois des habits qui ne craignent pas la terre, la boue, les feuilles… Et en vrai, ça remonte à quand, la dernière fois où tu t’es autorisée à te salir en te roulant dans la boue avec des copains et des copines de jeu ? Tu seras bonne pour une bonne douche chaude en rentrant chez toi !

Future participante : Et les chasseurs ? C’est pas en pleine saison de la chasse, là ?

Les chasseurs : si, si, mais si Entre les Arbres nous prévient à temps (genre 1 ou 2 jours avant), on s’organise pour ne pas aller sur son terrain, on vous laisse tranquille. On garantie juste pas que les gibiers et les chiens resteront toujours sur le secteur qu’on aura choisi, mais nos gars (et nos filles), ils / elles ne viendront pas, c’est sûr.

Organisateur : je confirme, ça s’est toujours bien passé, en bonne intelligence.

Future participante : Parce que c’est dans TA forêt ?

Organisateur : oui, c’est dans une parcelle de forêt qui appartient à Entre les Arbres et où La Tribu Dansante est invitée comme partenaire.

La forêt : raconte-lui la fois où vous avez quand même du annuler.

Organisateur : Ah oui, tu as raison. Sur les trois dernières années, nous avons maintenu deux sessions pour le sostice d’hiver, sur les trois qui étaient prévues. En 2020, en plein couvre feu du à la sortie du 2e confinement, où les gens étaient morts de faim de continuer à danser, danser encore. Ce fut un moment incroyable. Et en 2022, l’an dernier (2022), malgré -4°C en plein jour et un sol blanc de givre. Et ce fut encore un moment dingo. On a du reporter en février 2022 la session du solstice d’hiver de décembre 2021, pour cause de bouillasse trop humide. Quand la forêt a subi des mois de pluie et qu’il fait froid et humide, mais pas assez froid pour figer l’humidité sous forme solide, la forêt est gluante, bouillasseuse…

La forêt : merci bien !

Organisateur : Oui, bon, enfin, ce sont des faits, quoi. En gros, c’est tout glissant et mouillé partout, et là, ça ne donne vraiment pas envie. Mais même là, on peut y arriver. On se salit juste un peu plus, mais un bon grand feu aura tôt fait de nous remonter le moral.

Future participante : Mais pourquoi vous aviez annulé alors ?

Organisateur : c’était la combinaison de ces conditions avec la santé de l’un de nous. Pour nous, qui sommes derrière les platines, assis immobiles pendant très longtemps, s’il fait très humide et qu’on est en plus en train de tomber malade, là, c’est vraiment expo. Vous, vous bougez tout le temps et vous êtes près du feu. Mais pour nous, ça s’anticipe encore un peu plus. Pour 2023, on prévoit plus de bouillotes, plus de thermos, des pierres chauffées par le feu, des huiles essentielles et des citrons en traitement préventif. On est déter, et du coup, ça ne devrait pas être annulé (sauf si vous n’êtes pas assez nombreux.ses).

Future participante : Bon, je laisse infuser tout ça, et je verrai si finalement je m’inscris.

Organisateur : OK. Pas de soucis. N’hésite pas à sortir, autant que tu peux, pour t’habituer, et pour te rendre compte que finalement, de rester des heures dehors même en plein hiver, ce n’est pas du tout un problème, au contraire, ça fait énormément de bien. Ca participe fortement à la reconnexion. Juste une demande, ne t’inscris pas au dernier moment, ça nous met trop le sum à chaque fois de ne pas savoir jusqu’au dernier jour si on maintient ou pas.

Future participante : D’accord. Ca me parle. Je sens que vous avez raison. Et si je m’inscris, je le ferai le plus tôt possible.

La forêt : tu seras toujours bienvenue, ma chère enfant.

Organisateur : bienvenue à ta décision, quelle qu’elle soit. Merci pour tes questions 🙂

”Danse-forêt

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