Les constellations : transcender l’usage de l’espace par les perceptions sensorielles et émotionnelles
L’espace. Tout part de là. La réponse à la question « où » se transforme en réponse à bien d’autres questions. Qui ? quoi ? Pourquoi ? Comment ?
Ainsi fonctionnent les constellations systémiques des organisations. Des personnes incarnent des rôles, par exemple, s’il s’agit d’une problématique territoriale, le « territoire », les « administré.e.s », les « habitants autres qu’humains », le « littoral », le « Département », la « Communauté de communes », l’ « Etat », la « confiance », le « maire », « les générations futures », « les résistances au changement », les « financements européens », etc… Cela peut être des entités physiques (une rivière, une personne, un groupe de personnes, etc…), morales (une entreprise, un projet…) ou des concepts (ci-dessus, la confiance, les résistances au changement, l’argent de Bruxelles…). Ces rôles sont définis au départ entre le ou la faciitateur.ice de la constellation et le ou la constellant.e (la personne qui a besoin d’une constellation pour éclaircir et transformer une problématique complexe associée à un système) et sont attribués à des personnes qui prennent le rôle de représentant.e.s.
Les personnes qui incarnent des rôles se positionnent peu à peu dans un espace délimité, appelé le « champ » et dès lors qu’elles pénètrent dans ce champ, avec ce rôle, tout ce qu’elles vont ressentir et tous les comportements qu’elles vont avoir vont être, d’une manière ou d’une autre, signifiants pour le ou la constellant.e. Même si les représentant.e.s elleux mêmes ne comprennent rien à ce qu’iels font, ressentent, disent.
C’est toute la puissance des constellations. L’information est totalement disponible dans ledit « champ », et les représentant.e.s, depuis qui ils ou elles sont, captent une partie de ces informations sur le système, et les retranscrivent, comme ils ou elles peuvent, au fur et à mesure que la constellation se déroule (plusieurs positionnements sont testés tour à tour jusqu’à trouver un certain nouvel équilibre, cela peut durer parfois plus d’une heure).
De la magie, de la science, ou bien on ne sait pas encore ?
Cela peut paraitre bizarre, car il y a un effet qui peut être considéré comme magique, car il n’est pas encore très bien expliqué scientifiquement. il faut préciser que la science n’a pas encore beaucoup investigué de ce côté-là. D’aucun disent d’un air suffisant « C’est quantique, tout simplement ». Je les mets au défi de décortiquer ce qu’est un opérateur hamiltonien et comment il sert dans l’équation de Schrödinger, et enfin, en quoi cette équation permet de démontrer que oui, quelqu’un qui représente un rôle dont il ne connait pas la première information sur le plan mental, capte, dès qu’il rentre dans le champ, de nombreuses informations qui sidèrent le plus souvent la personne qui constelle, et qui se dit « Mais comment il sait ça, lui ??? Je ne lui ai jamais dit que mon adjoint venait de faire un burn-out, et il représente mon adjoint, et il ressent d’un coup un immense épuisement. ».
Avec la mécanique quantique, nous croyons tout pouvoir expliquer, justifier… sous prétexte que les particules (élémentaires) intriquées réagissent instantanément l’une l’autre si l’une d’entre elle est stimulée, même à l’autre bout de l’univers, faisant fi du temps de trajet habituel de l’information (qui ne peut pas dépasser la célérité de la lumière, à priori).
Je préfère dire, à ce stade, qu’on n’en sait fichtre rien, qu’on ne sait en réalité pas encore pourquoi les représentant.e.s captent tant d’infos sur un système organisationnel qu’ils ou elles ne connaissent pas du tout. On peut juste constater, de constellation en constellation, à quel point c’est puissant, à quel point les jeux qui se mettent en place permettent à la personne qui constelle de comprendre d’un coup des mécanismes qui sont rendus visibles par le dispositif, et qu’elle n’avait pas encore vus. De les comprendre, et au-delà, de transformer le système. Cela arrive assez fréquemment que quelques semaines après une constellation, le système se mette à bouger. Même si aucun des membres dudit système n’était présent ce jour-là (à part le ou la constellant.e). Là encore, ce n’est pas forcément quantique, là encore ce n’est pas explicable en l’état, et là encore, c’est constaté suffisamment souvent pour être une donnée solide.
Les constellations chez Entre les Arbres : une approche évidente depuis des années
A Entre les Arbres, l’approche constellatoire a été utilisée dès 2018 dans de nombreux stages.
- Dans le Voyage du Héros à travers la forêt, un des tous premiers processus consiste à interagir avec un.e représentant.e de son Appel intérieur, dans un champ qui contient de nombreuses informations potentiellement signifiantes : le terrain, les arbres, les oiseaux, la mousse, la lumière, etc… D’autres étapes du Voyage s’appuient à nouveau sur des méthodes similaires (dont trouver ses guides).
- Dans le stage sur l’intelligence relationnelle, les arbres sont encore plus impliqués et représentent des rôles à part entière pour les personnes.
- Dans le bain de forêt spécial relations amoureuses, une des invitations clés consiste à vivre une petite constellation pour chaque couple, où l’arbre choisi représente la relation.
- Dans le cadre des travaux du Lichen, une des méthodes les plus souvent testées est la Constellation de Tous les Etres, un mix entre le Conseil de Tous les Etres, et les constellations systémiques des organisations, permettant de donner, sous forme constellatoire, la « voix », à autant d’êtres, humains et non-humains (parfois même non-vivants !) impliqué dans un système et pour lequel une problématique est explorée (ex : « Comment faire pour que notre lieu ne soit plus autant perméable aux invasions de toutes sortes ? » ou « Comment retrouver l’harmonie avec le GAEC avec lequel nous partageons le lieu ? »).
- Dans nos coachings, il arrive également fréquemment que la démarche soit propice à proposer un modèle constellatoire. Et à chaque fois qu’il est mis en place, le client et votre serviteur se voient impressionnés par la quantité d’informations qui sortent, par les émotions qui sont générées, et par les transformations qui ont lieu par la suite.
- Dans nos facilitations, si nous proposons une démarche en U (de la Théorie éponyme), il y a forcément un passage avec une constellation, ce que le fondateur de la démarche, Otto Scharmer, appelle dans son jargon « entreprises » le social presencing theater. Des mots qui font moins peur, qui passent mieux, mais derrière, il s’agit bien de constellations, une fois de plus.
- Dans nos formations, de plus en plus de séquences sont proposées sous forme constellatoire, notamment la transmission du modèle de la diffusion sociale, d’Everett Rogers, où les stagiaires deviennent des éléments de contenu et entrent dans le schéma (préalablement dessiné au sol) et interagissent entre elleux. Ce qui sort est peu ou prou le contenu pédagogique qu’il est prévu qu’ils /elles aient acquis. Sauf que c’est elleux qui le « canalisent ». Le pouvoir d’appropriation n’est pas du tout le même !
A force, Entre les Arbres a développé une véritable passion pour ce que l’un des pères du coaching, et père de la PNL, Robert Dilts, nommait la psychogéographie. L’espace, toujours, qui passionne depuis qu’il est tout petit votre serviteur. Ledit serviteur avait d’abord commencé sa carrière en mêlant géographique et informatique pour proposer 16 ans de ses services en géomatique. Lassé par la réponse technocentrée, il a jeté la composante « matique » pour la remplacer par une nouvelle composante, plus chaude et vivante, « psycho », donnant la psychogéographie.
Comment la position dans l’espace de chacun.e influe-t-elle autant sur le « champ » ?
>> Faites le test la prochaine fois. Regardez dans une simple réunion qui se place où, en face de qui, à gauche de qui, à droite de qui. Qui tourne le dos à qui. Qui prend garde à la forme du cercle (est-ce d’ailleurs en cercle que vous vous placez ?), et qui n’y prend pas tant garde que cela. Le cercle comporte-t-il des trous ? Qui cela gêne-t-il ? Qui cela ne gêne-t-il pas ? Quelle est la répartition des hommes et des femmes dans le cercle, sans s’être concerté avant ? Qu’en faites-vous ?
Imaginez maintenant la même attention à cela, mais dans un processus dédié à exhausser les signaux pour les rendre encore plus évidents, en lien avec une question, elle-même en lien avec une problématique, un contexte, des acteurs, des élans, des blocages. Les constellations sont ce processus précisément.
Les territoires, des systèmes particulièrement complexes
Il se trouve que les territoires, et les acteurs territoriaux constituent des systèmes complexes, voire, en France, très complexes, du fait du millefeuille territorial, et du fait que les territoires compilent des sommes faramineuses d’intérêts humains et non-humains très hétérogènes. Beaucoup d’intérêts divergent, comme par exemple entre, au hasard, l’agro-business et les paysans vivriers, ou entre les chasseurs et les écologistes, ou encore les entreprises et les syndicats. Ce sont souvent d’abord ces intérêts divergents qui sautent aux yeux, laissant penser que le système est bloqué, qu’on n’arrivera jamais à, au choix, mettre en place un plan de mobilité douce efficace / réduire la production de déchets / revitaliser le centre-ville / stopper l’artificialisation / etc… Mais beaucoup d’intérêts, également, convergent. Entre groupes d’acteurs humains (paysans vivriers, écologistes, certains élus locaux), ou bien parfois aussi entre certains humains et certains non-humains, ce que Baptiste Morizot, dans ses derniers ouvrages (au moins « L’inexploré » et « Raviver les braises du vivant »), appelle les nouvelles alliances avec les vivants autres qu’humains. Par exemple, entre certains humains et le maïs OGM, entre les apiculteurs, les pollinisateurs et les plantes à fleurs, ou entre les habitants hors zones inondables, les rivières, les sols et les castors (et de nombreuses autres espèces qui bénéficient très majoritairement d’un ralentissement de l’écoulement de l’eau).
Les constellations territoriales peuvent faciliter largement la mise en lumière de ces jeux d’alliances et d’intérêts divergents et par là même, les faire évoluer : on se rendra compte, par exemple, que les lignes de fractures se déplacent par rapport à la représentation que l’on se faisait à priori, et que, ce constat fait, on proposera peut-être de nouveaux espaces de négociation, revitalisants pour tout le monde. Dans le cadre de la sylviculture industrielle par exemple, on découvrira peut-être plus facilement que pratiquement tous les acteurs présents, qu’ils soient humains ou non-humains ont intérêt à tourner la page de cette pratique, et à aller vers un autre modèle, après avoir remercié l’ancienne pratique, et les acteurs associés à cette pratique (reconnaître, remercier, dire au-revoir, tout autant d’étapes-rituels indispensables pour clôturer proprement et donner au système plus de chances de se transformer).
Entre les Arbres, qui a développé la Facilitation Territoriale, qui accompagne les territoires, les projets de territoire et les acteurs territoriaux pour faire territoire ensemble, dans un lien authentique, vivant et confiant, propose donc naturellement, aux côtés de Suzanne Chatard (A Coach Formation), une formation pour devenir facilitateur.ice de constellations systémiques dans le contexte de l’intermédiation territoriale. Formation coorganisée avec un de ses partenaires, Synergie Littoral.