Raviver les Braises du Vivant

Baptiste Morizot

Raviver les braises du vivant

Un front commun

@Acte Sud

Ce livre de 200 pages contient de très nombreuses idées fondatrices, innovantes, fondamentales pour le grand tournant du passage de l’Anthropocène vers le Symbiocène. Cette pensée structurér va permettre de déplacer les lignes de front, au service du vivant dans son ensemble, ce vivant qui tisse l’habitabilité du monde.  Homo sapiens a sa place dans cette toile, car lui aussi est un “ouvrier” qui a longuement (jusqu’à récemment, à peine quelques centaines d’années, au pire quelques milliers) participé, à son échelle,  à cette habitabilité.

Ce que dit ici Morizot, c’est que depuis quelques siècles, et surtout depuis quelques décenies, les humains devenus presque exclusivement des modernes, participent à la création d’un système extractiviste absolutisé qui, lui, détruit cette habitabilité. C’est le résultat d’une manière naturaliste de penser le monde, d’un rapport dualiste au cosmos, où il y aurait d’un côté les humains, e avec eux la “culture”, et de l’autre, tous les autres vivants, appelés “nature”, et considérables comme ressource, stock, ou décors.

De par les destructions récentes, massives, provoquées par cette déconnexion et ce manque d’égard aux autres ouvriers de l’habitabilité du monde, le vivant se meurt. Ce n’est pas une cathédrale qui prend feu, c’est un feu (de vie) qui s’éteint, et dont il faut raviver les braises le plus possible, dans le plus d’endroits possibles, et du plus de manières possibles.

Il développe et décortique, comme toujours avec finesse et profondeur, comment nous nous trompons de fronts lorsque nous nous retrouvons opposés entre d’un côté les partisans d’une agriculture paysanne respectueuse du vivant mais tout de même exerçant un certain contrôle sur les autres vivants et de l’autre côté les partisants des zones de libre évolutions, plus sûrs foyers de régénération du feu du vivant, afin que depuis ces “oasis” où nous ne prélevons rien, ce feu puisse reféconder les territoires détruits.

En fait, les vraies lignes de front ne sont pas là : elles se situent entre ceux qui participent à raviver les braises du vivant – et il y a un continuum d’actions possibles – et ceux qui voient les autres vivants comme de la nature, soit à exploiter (agriculture et sylviculture extractivistes capitalistes), soit à protéger par “au-dessus”, dans un rapport de domination fantasmé, dans les deux cas.

Il nous réexplique à quel point les croyances que sans nous, la nature ne peut pas bien produire et que nous sommes des producteurs qui permettent à la nature d’être plus productive, sont des croyances, justement culturelles, avec notamment la culture de l'”improvement” (“sans nous, c’est le bazar”).

Le vivant n’a pas besoin de nous, dit-il encore, mais paradoxalement, nous l’avons tellement malmené qu’il est à défendre.

Cet ouvrage montre quel changement culturel majeur (il s’agit ni plus ni moins d’un changement de cosmogonie, de rapport au monde) il nous reste à effectuer pour arrêter l’écocide, et pour limiter les risques qu’en s’éteignant, le feu du vivant nous éteigne avec, car nous sommes des vivants. Les humains qui oeuvrent à raviver les braises du vivant, par une agriculture ou une sylviculture douce, aux égards ajustés pour les autres vivants, ceux qui oeuvrent à créer des zones de libre évolution ne sont donc pas des ennemis. Ils sont alliés dans la défense du vivant face à d’autres humains qui participent à maintenir, voire accélerer les destructions issus de l’extractivisme. Et dans ce camp, se trouvent aussi, à leur insu, et par manque de discernement (et parce qu’ils n’ont pas encore fait leur révolution anthropologique), les experts naturalistes, souvent agissant dans le domaine institutionnel (Etat, Parcs, Conservatoires, etc…), qui sanctuarisent la nature en mode sauveur, toujours par “au-dessus”, et toujours parce qu’ils se pensent supérieurs à elle (sans s’en rendre compte, la plupart du temps).

Un autre rapport au monde est donc à inventer. il ne s’agit pas de rétablir des cultes, mais une nouvelle culture du bon sens, dont la base est le concept récurrent dans la pensée de Morizot : la notion de diplomatie des interdépendances, ou encore les égards ajustés, et que Glenn Albrecht théorise aussi de son côté dans Les émotions de la Terre quand il parle du Symbiocène. Une culture, également, qui réhabilite la notion même de vivant, à commencer par une attention au vivant en nous, attention qui n’est pas un caprice de hippie rêveur mais un égard pour rien moins que les forces à l’oeuvre qui nous maintiennent en vie chaque jour.

Le Lichen s’attache à tester sur le terrain comment cette diplomatie des interdépendance peut se mettre concrètement en place dans nos modes de décision, dans nos manière de ménager le territoire, en prenant en compte avec les égards qu’ils méritent, ceux qui participent activement à l’habitabilité du monde.

Et Entre les Arbres propose aussi d’agir dans ce sens en offrant des espaces de reconnexion profonde et parfois bouleversants aux autres qu’humains, en et grace à la forêt.

Extrait : une pratique inspirante, en lien avec l’art du Mentorat, et utilisable comme invitation de sylvothérapie

Réveillez votre curiosité

Lors de vos sorties en nature [aïe, le mot revient, fermez les yeux], choisissez un être vivant (animal végétal, champignon) ou un élément naturel.

  • Prenez le temps de vous poser 24 questions à son sujet. Par exemple: pourquoi vit-il ici ? Est-il commun ici ? Seul, entouré ? Quelle est sa saison privilégiée ? Quel âge a-t-il ? Etc…
  • Il s’agit uniquement de se poser les questions. Les réponses viendront ultérieurement… ou pas.

(Proposée par Pascale Laussel, association Dryade, [et toute première partenaire d’Entre les Arbres, dès janvier 2018])

L'animisme au secours de la politique

Une réflexion plus poussée sur comment l’animisme peut venir au secours de la politique, et à travers elle, de la survie de notre espèce, tout simplement !

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